dimanche 22 janvier 2017

2017, année de la désinformation ?

La semaine dernière, j’ai assisté à une conférence sur les dangers d’internet, dans le collège de ma fille. L’intervenant nous relatait tout ce qu’il avait expliqué à nos ados au cours de ses interventions dans les classes.
Il a notamment évoqué l’importance de développer l’esprit critique de nos jeunes et de leur faire prendre conscience que tout ce qui circule sur internet n’est pas forcément la vérité, loin de là. J’étais tout à fait d’accord avec lui, mais j’ajouterais qu’il me semble de plus en plus compliqué pour nous, adultes et parents de discerner le vrai du faux.
Le conférencier a avancé le fait qu’il était important que les jeunes distinguent les "vrais" médias. Qu’ils regardaient trop rarement les vrais sites d’infos comme Le Monde alors que nous, nous le faisions.
Mais à l’heure où ces médias n’ont plus aucune impartialité, à l’heure où les politiques passent leur temps à mentir où à relayer uniquement les infos qui les servent, qui croire ?
Le meilleur exemple en ce moment est notre cher nouveau président des Etats-Unis alias le roi du tweet! Depuis vendredi, circule la fameuse photo qui compare le nombre de présents aux investitures de Trump et d’Obama. Photo que « POTUS », lors d’un discours devant la CIA (quel rapport??) et par l’intermédiaire de son porte-parole a fortement décrié. Ce sont les méchants médias qui déforment l’information. Ils ont pris des photos sous des angles improbables pour laisser croire qu’il n’y avait personne. Et puis les pelouses étaient couvertes alors ça faisait pas la même impression. Et puis les installations étaient positionnées plus loin alors ça rendait pas pareil. Non, mais franchement ?? C’est à peine croyable et pourtant bien réel.
Comment allons-nous dans les mois à venir, être capable de discerner le vrai du faux si le président d’une des plus grandes puissances mondiales se défend comme un gosse pris la main dans le sac, à coup de tweets écrits en majuscules dès que quelque chose lui déplaît ?
Et finalement, qui a raison et qui a tort dans cette chamaillerie de cour d’école ? Je serais bien incapable de le dire. A moins d’avoir été présent à Washington ce jour-là, personne ne peut attester de la réalité…
On pourrait en dire autant pour la plupart des sujets actuels : la Syrie, les élections, les relations internationales, le froid… 
L’exemple de cette jeune interne et de sa vidéo partagée des millions de fois avant d’être savamment attaquée, pour ne pas dire publiquement lynchée, est très criante aussi. Êtes-vous capable de dire si elle y travaillait vraiment la semaine dernière aux Hôpitaux de Paris ? Moi je n’en sais rien … Alors qu'on aurait du retenir son discours très certainement sincère et assurément réel, il ne reste que la polémique et le doute. Bravo à ses détracteurs, ils ont réussi leur coup.
Les médias, tout support confondu, ne diffusent plus que des articles et reportages d’opinion, de réaction, de propagande et non des éléments argumentés ET contre argumentés, impartiaux et étudiés. Perso, je ne sais vraiment plus comment distinguer le vrai du faux, le juste de l’interprétation. Peut-être se contenter du Gorafi ? Au moins c’est divertissant et officiellement affiché que c’est bidon !


mercredi 18 janvier 2017

Viens, la suite, premier extrait




Lucie, été 2008

Appuyée à la rambarde de ma terrasse, je souffle la fumée de ma cigarette en laissant échapper un soupir. Me voilà à nouveau seule un samedi soir. Ce n’est pas vraiment ce que j’avais imaginé il y a quelques mois. Les souvenirs se frayent un chemin dans mes pensées. Je me revois recevant ce courrier de Lucas.
C’était il y a pas loin de deux ans. J’avais été transportée de joie et avais passé un week-end merveilleux en Alsace. Le concert, les deux jours avec LUI. Il avait choisi de me faire revenir et j’avais décidé de me laisser enfin aller au bonheur sans trop me poser de questions. J’avais suivi les conseils de Sandrine et profité à fond. Elle-même s’était rapidement installée à Strasbourg. Moi j’avais continué les allers-retours après cette première fois. Je connaissais la route par cœur. Nous la prenions à tour de rôle. Parfois il me quittait à quatre heures du matin pour rejoindre son boulot à huit heures. Je le faisais aussi. J’avais l’impression de retrouver ma jeunesse. Nous nous aimions comme des fous, comme des adolescents.
Après quelques temps les choses avaient suivi leur cours et nous avions envisagé la possibilité de vivre ensemble. Léna l’avait rencontré régulièrement et ils s’entendaient à merveille. Lucas jouait souvent avec elle et il semblait prendre plaisir à s’en occuper. C’était sa petite poupée, comme il l’appelait souvent. Je le vois encore le soir où il m’avait proposé de venir le rejoindre. Nous étions dans ma maison, assis sur mon canapé.
Tu serais prête à la quitter cette maison ?
Je ne sais pas. Pourquoi tu ne reviendrais pas plutôt dans les Ardennes ?
Lucas avait argumenté pendant des heures, il m’avait expliqué qu’il ne pouvait pas quitter Strasbourg, que son groupe tournait bien, qu’ils avaient de bons contacts et qu’il ne pouvait pas les lâcher alors qu’ils étaient tout près de réussir ce pour quoi ils travaillaient depuis des années. En effet, après leur concert à la Laiterie, beaucoup d’autres s’étaient enchaînés, jusqu’à une sélection l’année suivante pour le Printemps de Bourges. Là, ils avaient rencontrés un célèbre groupe de rock français qui les avaient pris sous leurs ailes. Ils leur avaient proposé de faire leurs premières parties pendant toute leur tournée et les avaient introduits auprès de leur maison de disque.
Impossible donc pour moi de lui demander de sacrifier cette carrière naissante pour revenir à Sedan. Je savais que Lucas m’en aurait voulu si je l’avais obligé à faire cela alors j’avais cédé. J’avais posé des candidatures dans tout le Bas-Rhin à la rentrée suivante et obtenu un poste satisfaisant dans une école primaire de Strasbourg à la rentrée 2007. Je n’avais jamais bougé de Sedan avant cela et avec un enfant et un rapprochement de conjoint, cela n’avait pas étrop compliqué.
J’étais consciente en partant que Lucas serait régulièrement absent en raison de ses concerts mais je ne pensais pas vraiment que ce serait à ce point. Les premières parties de XXX leur avaient amené une certaine notoriété et l’album, finalisé fin 2007, avait eu un succès immédiat. Les groupes de rock français avaient la cote à cette période. La chute de Noir Désir quelques années plus tôt avait laissé un vide qui ne demandait qu’à être comblé.
Je trouvais néanmoins que la maison de disque avait exigé de YYY des changements de style un peu trop marqués. Le rock festif qu’ils proposaient la première fois que je les avais vus à Metz s’était de plus en plus édulcoré pour devenir plus populaire et être plus facilement diffusé sur les radios. Cela avait fonctionné d’ailleurs, leur premier single tournait en boucle sur les ondes. Lucas avait du mal à accepter mes critiques. Il disait qu’il ne voyait pas de changement dans leur style, que j’étais de mauvaise foi. J’avais arrêté d’insister.
Il était grisé par ce succès naissant. Les ventes de l’album continuaient à augmenter au fil des sorties de singles et au printemps de l’année suivante, cette année en l’occurrence, Lucas m’avait fait la surprise de louer un nouvel appartement. Il avait tout organisé sans rien me dire et le jour de mon anniversaire il m’y avait emmenée. Yeux bandés, repas aux chandelles sur la terrasse sur laquelle je me trouve en ce moment, massages et nuit torride ne m’avaient pas laissé d’autre choix que celui de craquer sur ce magnifique logement.
Une cuisine dernier cri, un immense salon cerné de baies vitrées qui s’ouvrent sur une terrasse offrant une vue imprenable sur la cathédrale de Strasbourg. Une chambre et une salle de jeux pour Léna. Une suite parentale, comme Lucas se plaît à l’appeler, spacieuse et lumineuse. Le tout à dix minutes à pieds de l’école où je travaille et où est inscrite Léna. Cet appartement est un rêve éveillé. Un bien que je pensais ne pouvoir jamais m’offrir. D’ailleurs, ce n’est pas vraiment moi qui me le suis offert. Les revenus de Lucas contribuent largement à son financement tandis que mon salaire d’instit est anecdotique. Néanmoins, voulant garder une certaine forme d’indépendance, j’avais insisté pour en payer une partie. Je ne voulais pas dépendre intégralement de lui.
Quoiqu’il en soit, et aussi idyllique que puisse paraître ce tableau, je n’ai pas vraiment le moral ce soir. J’ai passé la journée seule car YYY jouait à Belfort et ils sont partis tôt ce matin. La nuit est maintenant bien avancée mais je ne parviens pas à dormir. Comment vais-je faire quand la tournée à proprement parlé aura commencée ? A compter du mois prochain, Lucas sera parti plusieurs jours par semaine. Il reviendra uniquement quand il aura quelques jours entre deux concerts. Je déteste rester seule. Une peur sourde s’insinue souvent en moi quand la nuit s’installe. C’est l’héritage que m’a si gentiment laissé Manu…
Manu. Je ne devrais pas penser à lui. Après l’agression qu’il m’a fait subir j’ai fait des cauchemars pendant de longues semaines. Heureusement que mon frère Michaël et son ami Eric sont restés chez mois aussi longtemps que cela a été nécessaire. Les cauchemars ont fini par s’estomper. Comme Lucas venait souvent le week-end ou que je le passais à Strasbourg, Michaël et Eric ont fini par quitter la maison pour s’installer tous les deux. Il fallait bien que je m’en sorte seule.
J’ai revu Manu uniquement lors de son procès, environ un an après l’agression. Il avait passé ces douze mois en détention provisoire. Je les avais passés heureuse d’être avec Lucas mais angoissée quand j’étais seule à la maison. Cela aussi avait d’ailleurs été un argument de choc pour que Lucas me persuade de le suivre. Il me disait que je ne pourrais pas tourner complètement la page tant que je serais dans les lieux où cela s’était passé. Il n’avait pas tout à fait tort car la vie à Strasbourg m’avait fait du bien.
Je venais juste d’y emménager quand j’ai reçu ma convocation pour le procès. Il m’a fallu retourner à Reims. Heureusement, cela a été très court. J’avais choisi d’accepter de qualifier ce qui s’était passé comme une simple agression sexuelle afin que Manu n’ait pas un procès en cour d’assises. Pas de jury populaire, pas de défilé de témoins à la barre, ça me paraissait plus supportable, à la fois pour moi et pour lui. La peine n’en avait pas pour autant été plus légère puisqu’il avait écopé de quatre ans de prison dont trois fermes.
Il m’arrivait régulièrement, comme ce soir, de penser à lui. Il devait être au fond de sa cellule en ce moment. Je me tourne vers l’appartement dont les lumières sont allumées. Ne suis-je pas moi aussi dans une prison ? Beaucoup plus dorée que celle de Manu, mais une prison quand même.
Je secoue la tête pour chasser ces pensées et prend une nouvelle cigarette dans le paquet posé sur la table près de moi. La solitude ne m’aide pas dans mes projets régulièrement avortés d’arrêter de fumer. Je m’appuie à nouveau sur la rambarde et observe la ville en dessous de moi. Tout est calme à cette heure. De temps à autre, je perçois des cris, quelques éclats de rire de jeunes probablement alcoolisés. Perdue dans mes rêveries, je n’ai pas entendu la porte-fenêtre s’ouvrir et Lucas se glisse jusqu’à moi sans que je m’en rende compte. Ce n’est que lorsqu’il soulève mes cheveux pour m’embrasser dans le cou que je sursaute.
Lucas ! Mais tu es fou de me faire une peur pareille !
Mon amour ! J’adore te surprendre.
Comment s’est passé ce concert ?
Bien. Mais on s’en moque, ajoute-t-il en m’embrassant avec fougue. Tu m’as trop manqué !
Il m’a tournée vers lui et continue à picorer mon cou de ses baisers, tout en me caressant le dos avec sensualité. Je le laisse faire quand il enlève mon gilet et fait glisser la fermeture éclair de ma robe. Je me retrouve très vite en sous-vêtements, au beau milieu de ma terrasse mais je ne pense pas une seconde à l’éventualité qu’un voisin nous aperçoive. Comme toujours, ses regards m’ont envoûtée et j’ai oublié les doutes qui me tenaillaient en son absence. Quand il est avec moi, tout n’est que pur bonheur. Je m’empresse donc de le déshabiller à son tour et lui rend ses baisers. Il m’assoit sur la table du salon de jardin pour me faire l’amour. C’est comme ça avec lui, peu importe le lieu ou le moment, il cède à ses envies sans se poser de questions. Et j’adore ça !