mercredi 30 décembre 2015

365 jours



365 jours, 365 jours si longs
Année abominable, année interminable
Démarrée dans l’horreur qui semblait absolue
La suite nous a laissé des espoirs vite perdus
L’émouvante unité du 11 janvier
S’est si vite délitée.

Aidé par des médias insatiables,
Notre quotidien s’est retrouvé errant
Entre chômage et migrants
Deux mots si simples mais tellement ressassés
Qu’on a fini par oublier la souffrance qu’ils recèlent.


Chaleurs torrides, inondations, catastrophes naturelles
Notre terre aussi a voulu nous alerter
Mais nos politicards restaient tous aveuglés
Cachés derrière leur COP21,
Ils tentent de faire croire qu’ils veulent notre bien
Mais ils sont impuissants, dépassés,

Autant par le climat que par ces guerres lointaines qui les ont rattrapés,
S’immisçant dans nos rues sans y être conviées.
L’unité cette fois n’a pas gagné.
C’est la discorde qui sort vainqueur de ce mois de novembre,
Elle nous a mis KO et a laissé la haine se répandre

On a bien essayé de tout planquer,
Mettre nos peurs sous le tapis, à coups d’état d’urgence
Avant de ressortir les sujets inutiles
Pendant qu’ils polémiquent, ils peuvent se voir subtils.

On a même essayé de nous acheter,
La joie et le bonheur comme au supermarché,
Guerres galactiques et sabres lasers
Feront-ils oublier la misère ?

En cette fin d’année, j’aimerais croire que pour les 365 prochains jours
Les choses vont changer
Que les milliards de starwars pourront faire manger
Cette moitié de l’humanité qui ne sait même pas ce qu’est le ciné
Que les signaux d’alertes maintes fois tirés, cesseront de raisonner dans le vide.

Je voudrais que 2015 n’ait été qu’une parenthèse
Que tout son lot d’atrocité devienne un tremplin,
Une porte vers le meilleur
Que ces souvenirs nous empêchent de céder aux appels du repli intérieur

70 ans ont passé depuis que l’homme a montré son plus noir visage
Prenons-le comme un présage,
Gardons 2015 comme un talisman, un avertissement.

En cette période propice,
J’aimerais vous souhaiter, j’aimerais nous souhaiter
Que chacun prenne conscience de la préciosité de notre paix,
De la beauté de notre vie et de notre liberté
J’aimerais vous souhaiter, j’aimerais nous souhaiter
De construire au plus juste les 365 prochains jours
Pour qu’ils ne soient pas qu’une année mais les premières marches de tant d’autres après.




mardi 8 décembre 2015

Soir de premier tour ...



Pendant qu’à quelques battements d’ailes,
L’Etna, rageur, crache tous les feux de la terre,
La France, meurtrie, touchée au cœur,
Déverse sa rancœur, crache toute sa FHaine …

Sa haine contre qui, le sait-elle seulement ?
Contre « l’Etranger » ?
Il faut lui mettre ici majuscules et guillemets
Ce mot qui veut tout dire, ce mot si vide de sens.

Pour quelques fanatiques
Devons nous renoncer ?
A tout ce qui a fait ce pays ?
Ce que tant nous envient ?

Liberté, égalité, fraternité…refrain tellement chanté
Scandé fièrement comme un remède à tous nos maux
Pour finalement ce soir n’être plus que des mots, que du vent,
Qui se dispersent au gré de nos régions

Vous qui nous gouvernez
Pouvez-vous comprendre ce soir
Ce que vous avez fait ?
A trop penser à vous, à aimer le pouvoir,
Vous avez fait de nous des pantins misérables
Qui se raccrochent à tout, qui se raccrochent à rien
Qui pleurent leurs idéaux
Qui tremblent pour demain. 

Place de la Rep






Le froid est là maintenant, cru, mordant,
A croire qu’il s’est fait attendre
Juste ce qu’il fallait pour permettre l’horreur.

La lune, élégante, se pointe aux premières loges,
Dans un ciel encore bleu azur
Elle observe sans comprendre

Elle voit ces hommes hagards
Errer sur cette place, l’autre jour si gaie.
Ils semblent effarés,
Ils semblent sidérés,
Une larme coule parfois le long de leurs joues froides.

Des bougies, des dessins, des fleurs et des écrits,
Des plaintes infinies qui montent au devant d’elle
Elle ne veut pas les voir
Elle pourrait se cacher.
Il est encore très tôt, qui donc s’en soucierait ?

Peut-être cette femme qui lève les yeux vers elle.
Elle est belle, presque pleine, dans ce ciel jaunissant.
Elle est là, toujours là
Rappelant que la terre tourne,
Que la vie continue, comme ils le disent en bas,
Errant sur cette place,
Semblant se demander, semblant lui demander,
Pourquoi ce jour-là, se furent d’autres et pas eux ?

Que viennent-ils tous faire là ? lance un ado fâché
Ils viennent pour voir le sang !
Elle voudrait lui dire non,
Qu’ils viennent défier la mort,
Aimer ceux qui étaient là,
Tenter de s’excuser d’avoir été ailleurs.
Comme elle, ils entendent toujours et encore,
Résonner leurs cris, hurler leur agonie.

Elle voudrait s’éloigner.
Quitter pour quelques temps cette putain d’attraction,
S’éloigner, oublier
Errer comme ils le font
Mais bien plus loin d’ici.
Fuir cette planète folle
Cesser d’en faire le tour.

Mais elle reviendrait, comme chaque nuit, elle le sait
Elle voudrait retrouver cette place qu’elle connaissait,
Et ces hommes riant
Et ces hommes chantant
Ceux des nuits parisiennes,
Ceux des belles nuits d’avant …


La version musicale :
https://soundcloud.com/user-225662337/place-de-la-rep

Hestia et les attentats, pensées d'un chien en ces temps troublés ...



Pas de nouvelles aventures pour moi aujourd’hui, mais plutôt des réflexions de chien sur cette drôle de fin de semaine qu’on vient de passer… Je n’ai pas vraiment tout compris mais mes maîtres étaient bizarres ce week-end. Ca a commencé vendredi quand ils ont passé leur soirée devant la télé. C’était pas comme d’habitude. Normalement, à cette heure-là, le canapé je ne l’ai que pour moi. Mais vendredi, ils restaient là et n’allaient pas se coucher. Et ils semblaient affectés, étonnés. Je ne comprends pas trop ces sentiments humains. Par contre, la peur, je sais bien ce que c’est. Et je la ressentais chez eux vendredi. Ils commentaient, ils échangeaient, ils se questionnaient mais ne semblaient pas trouver de réponses.

            Pourtant, le lendemain, ils ont essayé d’expliquer à ma petite maîtresse. Mais du haut de ses 11 ans, elle ne semblait pas mieux comprendre que moi. On a regardé encore les mêmes images mais moins longtemps cette fois, juste pour qu’elle sache. Elle aussi a vu les morts, le sang, l’horreur. Elle a demandé pourquoi. On lui a dit « pour rien, parce qu’ils sont fous ». Elle a demandé si ça pouvait arriver ici. On lui a dit peut-être, qu’on ne pouvait pas savoir.

            Elle aussi avait peur. La peur, c’est bien le seul sentiment humain que je peux comprendre. L’horreur gratuite, on ne connaît pas, nous les chiens. Un chien peut se battre pour manger. Un chien peut se battre pour défendre son territoire, pour défendre sa famille, pour se protéger ou les protéger. Mais il ne va pas attaquer un autre chien comme ça, sans raison. Les hommes si apparemment.

            Vendredi, ils ont attaqué n’importe qui, et tout le monde en même temps. Des gens qui s’amusaient, qui mangeaient, qui écoutaient de la musique. Ces gens ne les avaient pas attaqués. Ils ne les connaissaient pas. Mes maîtres et la télévision parlent de haine. Je ne sais pas ce que c’est la haine. Je sais ce que c’est que l’amour. J’aime mes maîtres, ma petite maîtresse, ma maison, mes autres copains chiens. J’ai compris que la haine c’était l’inverse mais je ne saisis pas pourquoi on peut ressentir ça. Ca sert à quoi ?

            Je peux comprendre qu’un homme n’en aime pas un autre ou n’aime pas sa façon de vivre. Moi aussi il y a des chiens avec lesquels je n’ai pas envie de jouer ou de partager ma gamelle de croquettes. Mais pour autant, je ne lui saute pas à la gorge pour le tuer. Je me contente d’aboyer vaguement dessus s’il s’approche un peu trop près de moi mais il ne me prend pas l’envie de le tuer. Et encore moins de me tuer pour le tuer. Parce que là c’est ce qu’ils ont fait me semble-t-il…

            Ce qui est d’autant plus incompréhensible dans cette haine chez les humains, c’est que plutôt que de leur donner envie de donner encore plus d’amour pour s’en défendre, ça donne à beaucoup d’entre eux encore plus de haine. Ils tournent en rond les humains. Ils sont sensés être beaucoup plus intelligents que nous, ils savent faire des tas de choses que nous on ne peut pas faire, ils nous construisent des maisons, ils réfléchissent tout le temps. Mais en fait ils ne comprennent rien.

            En plus, ils se détestent les uns les autres. Pour moi, ils sont tous pareils les humains. C’est comme les chiens. Je vois bien qu’il y en a qui ne sont pas tout à fait identiques à moi. Il y en a des petits, des gros, des pleins de poils, des sans poils. Les gros, ils me font un peu flipper au début, mais passées les premières minutes, je me rends vite compte que la plupart sont tout comme moi : ils aiment jouer, courir dans la forêt, manger, aimer leur maître. On ne se ressemble pas tout à fait mais on est tout pareil en fait. L’humain, j’ai l’impression qu’il n’a pas cette capacité à se rendre compte que celui qui n’est pas tout à fait pareil que lui physiquement, il est en fait tout pareil : mêmes besoins vitaux, mêmes comportements, même recherche d’amour, même besoin de famille…

            J’ai essayé de les consoler, mes maîtres, pendant ces 2 jours, mais j’ai l’impression que mes câlins ne suffisent pas. Ma petite maîtresse, elle, semble penser à autre chose. Mais je sais aussi qu’elle pleurera sûrement quand elle devra se taire pendant une minute demain au collège pour penser à tous ceux qui sont morts. Ma maîtresse, elle pleurera sûrement aussi. Elle doit aller à Paris bientôt. Je ne sais pas où c’est Paris mais je crois que c’est là que tous les gens ont été tués et tout ce que je sais c’est qu’elle n’a pas très envie d’y aller. Moi non plus je n’ai pas envie qu’elle y aille parce que je n’ai pas envie qu’elle meure. Je ne voudrais pas qu’elle ne rentre pas de Paris. Il y a sûrement plein de chiens, et pleins d’humains qui attendent aujourd’hui que leur maître, que leur mère, que leur fille rentre de Paris mais ils ne rentrent pas …

            Mon petit cerveau de chien ne comprend décidément pas l’humain. Si je pouvais parler, je leur conseillerais de faire comme moi, de ne pas se soucier de leur argent, de leur dieu, de leur haine, de la couleur de peau de leur voisin mais de se concentrer sur ce qui est le plus important à mes yeux : voir mes maîtres rentrer tous les jours à la maison, savoir que même s’ils s’absentent, ils seront là un peu plus tard, qu’ils me donneront à manger, qu’ils me feront des câlins, que je serai là pour eux et qu’ils seront là pour moi, qu’on pourra tous ensemble profiter d’une belle promenade dans les bois, qu’on pourra regarder le soleil briller, qu’on pourra jouer à la balle et entendre ma petite maîtresse rire aux éclats. Si seulement je pouvais parler pour leur dire que leur vie serait beaucoup plus simple et plus belle s’ils parven  aient à garder ça à l’esprit …

Chroniques d’une fraude ordinaire




Quand vous vivez dans un charmant village alsacien, entouré de collines couvertes de vergers et de vignes, vous êtes bien loin des images dont les chaînes d’information en continu se repaissent quotidiennement.

La violence ici ? Les bagarres pendant les récrés, après que ce voyou de Nicolas a chapardé le plus beau stylo de Joachim.  La délinquance ? Les trois jeunes qui s’approprient tous les soirs la cour de l’école, y laissent traîner leurs mégots et parfois, quand ils s’ennuient un peu plus que les autres jours, se défoulent une boîte aux lettres. La fraude ? Un gros mot que vous entendez souvent dans telle ou telle passionnante émission d’une quelconque chaîne de la TNT (sur laquelle vous vous arrêtez souvent en zappant, mais ça, vous ne l’avouerez jamais devant témoin !).

Et puis, un jour, la fraude se rappelle à vous. Elle vous fait comprendre, insidieusement, que dans votre petit paradis, vous ne lui êtes pas totalement étranger. Au détour d’une étrange ligne de dépense sur votre relevé de compte, elle vous chuchote qu’elle est bien là, à l’affût, prête à bondir sur vous si l’occasion se présente : vous rentrez du sport un samedi midi et votre femme vous demande à quoi vous avez bien pu dépenser 800€ en milieu de semaine. Vous lui demandez si elle a perdu la tête ! Puis vous vous demandez si VOUS avez perdu la tête. Parce que vous la voyez cette ligne de dépense sur l’écran de votre smartphone et que c’est bien avec votre numéro de carte bleue qu’elle a été faite. Alors vous vous mettez presque à douter. « Qu’est-ce que j’ai fait ce jour-là ? ».

Vous réfléchissez, vraiment. Puis votre cerveau finit par vous accorder la paix en admettant que ce n’est pas vous. Ouf, un instant vous vous êtes cru tout près de la maladie mentale.

Maintenant que vous avez retrouvé vos esprits, il ne vous reste qu’à agir : téléphoner pour faire opposition, faire un mail à la banque pour leur signaler le problème (parce que c’est samedi, alors la banque est fermée, sinon ce serait trop facile), prier pour que d’autres débits n’arrivent pas dans les prochains jours, vérifier et re-vérifier que toutes les autres lignes de ce satané relevé de compte correspondent bien à des achats que vous avez vraiment effectués.

En sortant de chez vous un peu plus tard, vous vous sentez soudain moins seul : quand vous racontez votre mésaventure à un voisin, il vous répond avoir subi la même chose il y a quelques jours ! Même somme, même façon de faire, même type de dépense (un site de téléphonie mobile). Et un de ses collègues aussi, il y a quelques semaines, a vu plus de 1000€ s’envoler de son compte.

Vous décidez de vous rendre à la gendarmerie de la petite ville voisine. Vous n’êtes pas un habitué du lieu bien sûr, la dernière fois que vous y êtes allé, c’est quand vous avez égaré votre permis de conduire ! On vous accueille cordialement mais nouvelle surprise : la dame qui attend dans la salle d’attente est là pour la même raison que vous !

Le gendarme note scrupuleusement tout ce que vous racontez. Il vous explique que vous ne pouvez pas porter plainte parce que vous n’êtes pas la victime ! « Mais c’est quand même bien sur mon compte que la somme a été débitée ! » Patiemment, il vous rappelle que la banque va vous rembourser et  que c’est donc elle la victime. « Alors la banque va porter plainte ? ». Probablement pas, vous répond le gendarme. Ca ne mène jamais à rien, ils sont assurés et ce genre de fraude mène presque toujours à l’étranger.

Vous hochez la tête, décontenancé. Ca vous fait réfléchir : on peut donc frauder en toute impunité, aucun risque de se faire prendre puisqu’il n’y a pas de plainte, donc pas d’enquête. Vous tentez de parler de votre voisin, de la dame en salle d’attente. Dans votre tête, tous les scénarii défilent : une caissière malveillante au magasin du coin, une caméra placée sur le distributeur de billets du village. Vous regardez trop la télé… Mais le gendarme est plus pragmatique. Des déclarations comme la vôtre, il doit en saisir 20 à la semaine. Alors vous repartez avec le papier qui permettra à votre banque de vous rembourser. Et c’est tout …

Non, ce n’est pas tout ! Vous ne voulez pas en rester là ! C’est trop facile ! Votre sens moral, vos valeurs sont heurtés. Le type qui vous a fait ça ne peut pas s’en sortir comme ça ! Il ne va quand même pas recevoir un superbe téléphone à 800€, que vous ne vous offririez jamais vous-même, en utilisant votre argent !! Vous contactez alors le site sur lequel l’achat a été réalisé. Encore une fois, vous êtes reçu très aimablement. Votre demande est prise en compte. Le colis va être bloqué. Vous voilà soulagé, ce petit c*** n’aura jamais son téléphone ! Vous pouvez reprendre le cours de votre week end avec l’esprit un peu libéré !

Mais même en vous promenant dans les vergers en fleurs, en respirant l’air doux du printemps, votre esprit est pollué par une foule de questions : si tant de monde est concerné, pourquoi ne peut-on rien y faire ? Doit-on laisser passer ? Oublier sitôt le compte en banque re-crédité ? Ne pouvez-vous pas au moins  vous exprimer ?

Alors en rentrant, vous prenez votre ordinateur, ouvrez votre traitement de texte et laissez sortir votre désarroi, pour qu’au moins, chacun soit attentif : qu’il ne laisse pas passer un débit sans y faire attention,  qu’il contacte les sites marchands pour empêcher l’envoi des commandes aux fraudeurs, qu’il alerte sa tante, sa grand-mère, son vieil oncle qui sont encore plus vulnérables que lui …  

Et tout simplement pour qu’au moins,  chacun ne se sente pas seul face à ces « fraudes ordinaires » …